Je viens de finir cette fabuleuse série. Une série qui dérange, qui nous pousse à admirer un tueur. En fait on se prend à suivre les sensations qu'éprouve le héros. S'il apprécie une personne, on l'apprécie, et si l'instant d'après il la déteste, on la déteste à notre tour.
Je donne l'avis éclairé d'une connaissance sur la deuxième saison. Je ne pourrais rien dire de plus que ça, et de façon beaucoup moins bien tournée.
Je remercie donc Sechs de ce texte. Attention, il livre beaucoup de spoil sur cette dernière saison.
Que dire de cette saison deux, si ce n'est qu'elle fut un chef d'oeuvre
? Les mots ne manquent pas pour imager mes impressions, mais le champ
lexical de l'apothéose est assez large pour que je passe toute une nuit
à les énumérer. Vous comprenez tout de même mon sentiment à l'égard de
la saison -et de la série par corrélation- en elle-même. Là où la
première saison nous immergeait dans l'univers créé par Jeff Lindsay,
où James Manos Jr distillait sa propre conception de l'intrigue, ce
dernier se réapproprie l'oeuvre de Lindsay dans la deuxième -voire
seconde- saison et nous prouve réelement qu'il a touché de l'or en
entamant Dexter. Ni plus ni moins.
Mais aussi, là où la saison se distingue de la précédente, c'est
dans le caractère imperméable de sa fin. C'est simple, aucune nouvelle
intrigue n'est esquissée, ni ne semble envisagée. Quelque part, c'est
une charge en moins pour attendre, mais d'autre part, la troisième
saison est incertaine. Là encore, une alternative : c'est très bien
parce qu'aucune nouvelle intrigue pourrait être au dessus de celle là ;
c'est dommage parce que ça s'achève aussi vite. Et le passage à la fin
où Dexter se sert un petit déjeuner digne du générique tend à prouver
la deuxième solution. Mais bon, deux saisons de cette qualité, c'est
déjà énorme.
Les personnages y sont extrèmement vivants et émouvants, et
surtout son héros qui réussit le tour de force de nous paraître très
empathique, sans pour autant avoir de sentiments. Et le tout grâce à
cette voix off, qu'on attend toujours dans les moments tendues et qui
nous permettra de jouir pleinement de l'intrigue. Mais heureusement, il
n'est pas le seul à nous faire cet effet-la. Bien que ce soit une
aventure suivie d'après les yeux de Dexter et sa vision en partie
aseptisée -car dénuée de sentiments- des autres personnages, ces
derniers ne nous en apparaissent que beaucoup plus attachants. Tous.
Sans exception. Que ce soit Debra, Rita et les enfants, Laguerta,
Lundy, Harry, Angel, Masuka ou... Doakes. Les quatre premiers -si l'on
compte les enfants de Rita comme deux que j'ai cité- le sont évidement
parce qu'ils sont très proches de Dexter, je n'y reviendrai pas. Pour
Maria, c'est surtout la fin qui en fait quelqu'un de très sensible,
puisque son attache à James ne fait que ressortir avec les évènements
et que son expérience finale ressemble beaucoup à celle qu'à vécu Deb'
dans la première saison. J'ai beaucoup été touché par la collecte
qu'elle fait à la fin et sa discussion avec Debra, vraiment. Elle perd
de son côté salope manipulatrice affamée de pouvoir
mais gagne énormement plus. Nul doute que j'attends beaucoup d'elle si
une troisième saison se présente. Ensuite, Lundy est surtout
sympathique dans la liaison qu'il a eut avec la soeur de Dexter, et la
sorte de complexe Oedipien qu'il apporte au personnage sus nommé. Mais
son côté tranquille, aimant se faire un lunch
à l'heure de manger au lieu de faire l'investigation, ainsi que son
amour de la musique classique font de lui un personnage qui laisse des
traces, nul doute. Harry, même en étant mort, continue à livrer ces
secrets, même s'il est plus discret dans cette saison. Mais cela
n'enlève rien à l'intérêt qu'apporte le personnage et au cliff qu'il
nous apporte lorsque la vie de son fils adoptif s'effondre à cause des
principes qu'il a bâti. Beaucoup moins omniprésent, son spectre aura
tout de même eu de magnifiques interventions. Puis Angel, vraiment
malmené à la fin de cette saison, ce qui donne envie d'aider ce
nounours sudaméricain malheureux de ne pas voir autant sa fille et
d'avoir été aussi sournoisement manipulé. Masuka, surtout pour le
comique qu'il apporte à la série -dans un humour moins corrosif que
celui de Dexter, mais tout autant efficace- les répliques qu'il
prononce, toutes plus cultes les unes que les autres ("Mon Dieu... le super sans plomb à 3.94 dollars",
géniallisme de surprise et déridant à souhait), son côté rat de
laboratoire à la finesse fortement dissimulée. Et puis il y a Doakes,
sublimé par la saison. La fin de saison l'aura rendu attachant au plus
haut point, surtout lorsqu'il devient une sorte de confident pour Dex'.
Ce qui lui arrive est d'autant plus regrettable que c'est l'évènement
qui m'a le plus choqué de la série. Comprenons que James faisait parti
intégrante du mythe dextérien, et que sa perte est d'autant plus
regrettable qu'elle laisse un vide dans la série. Un vide nécessaire,
mais tout de même douloureux. Je m'y serai beaucoup attaché lors de
cette saison, et le manque à la fin n'en est que plus grand. Mais nul
question de remettre en cause le scénario ou la série, surtout pas.
Reste le personnage particulier à la saison, à savoir Lila. Elle
aussi vraiment prenante. Partie noire et non refoulée du visage de
Dexter, elle aura eu une énorme impact sur ce dernier. Un diable à
visage humain, on se surprend tantôt à l'adorer lorsque Dexter l'adore
et à la détester lorsque ce dernier la déteste. Franchement, chapeau
pour m'avoir plongé au plus profond des sentiments de ce tueur au
charisme sans égal. Et surtout, sa fin est symbolique puisque Dexter
n'accomplit pas le rituel qu'il fait à chacune de ces victimes, comme
s'il la distinguait pour la rabaisser mais aussi pour l'élever au
dessus des autres tueurs. Simplement magnifique. De ce point de vue là,
Lila aura été géniale en vampire britannique drainant la face plane de
Dexter pour lui insuffler de la vie.
Très bon point pour ce bilan de saison, le nombre de scènes gravable en
mémoire est assez phénomènale. En vrac, la découverte du cimetierre
sous marin de Bay Harbor ; les différentes fins alternatives de la
discussion avec Debra, à mourir de rire ; Dexter emmené au commissariat
se retrouvant devant sa boîte fétiche ; Doakes se faisant enfermé dans
la cage ; Dex' s'imaginant en super héros... Que de l'excellent.
Pour finir, il y a cette intrigue du Boucher de Bay Harbor, qui,
comme sa prédécesseure -avec l'Ice Truck Killer- s'achève et dénoue
tous les fils qu'elle tendait. Aucun sous entendu qui pourrait ramener
l'affaire sur le tas, tout finit dans la plus grande transparence. Et
c'est ça qui plait. Le nouveau départ de Dexter semble ne pas en être
un, mais le bougre a admirablement bien évolué dans cette saison,
passant d'élève à maître. S'appropriant le code d'Harry et en faisant le Code de Dexter. Reprenant sa vie en ayant comblé les brêches, et prêt à repartir à sa chasse à l'Homme. Le Dark Passenger
est de retour, et il sera encore plus efficace que le Boucher. Ne
cherchant plus de réponses à des questions saugrenues, Dexter devient
entier. Il est sublimé.
Je n'ai pas de réponses à ces questions. Mais qui pourrait les avoir ?